Bien-être

En entreprise, les quatre jours, c'est possible !



La semaine de travail de quatre jours, une utopie ? Certaines entreprises se montrent volontaristes. Retours d’expérience.

Dans certaines entreprises françaises, la semaine de quatre jours est une réalité. Ces pionnières ont diminué le temps de travail de leurs salariés avant les 35 heures, à la faveur de la loi Robien de 1996 qui offrait des exonérations de charges contre une réduction du temps de travail permettant de favoriser des embauches. Certaines, dont de grandes sociétés comme Fleury Michon, Monique Ranou, Mamie Nova ou La Macif sont même passées aux 32 heures. Mais, sur ce sujet, ces entreprises bloquent la communication ! ont-ils peur de réveler le paradis du salarié ? Mystère !

D’autres assument la semaine allégée. C’est le cas d’Yprema, spécialisée dans le recyclage des matériaux de déconstruction. Il y a vingt ans, elle a abaissé le temps de travail de ses 42 salariés de 40 à 35 heures, effectuées sur quatre jours au lieu de cinq. « Paradoxalement, la RTT permettait à nos machines de fonctionner plus et donc d’augmenter la capacité de production », témoigne Claude Prigent, le PDG et fondateur. L’accord a entraîné la création d’une dizaine de CDI en un an. Aujourd’hui, l’entreprise compte 80 salariés répartis sur neuf sites en France. « Notre expérience économique concrète montre que la semaine de quatre jours peut contribuer au développement d’une entreprise », explique Claude Prigent.

Pour permettre aux sites de tourner toute la semaine, des postes de polyvalents ont été créés pour la partie exploitation, et un système de binômes et de trinômes a été mis en place côté bureaux. Outre les gains pour l’entreprise, les bénéfices pour les salariés sont réels. Et ce, malgré des journées un peu plus longues. « Une fois que la journée est lancée, on n’est pas à une heure près, tempère Susana Mendès, la secrétaire générale. Avec un jour libéré par semaine, les salariés sont plus en forme, donc plus efficaces. »quatre jours

Réduire le temps de travail plutôt que de licencier

Chez Cythelia, un bureau de conseil dans l’énergie solaire installé en Savoie, la semaine de 35 heures en quatre jours a autrefois aussi été une réalité. La décision a été prise en 2011, suite à la baisse brutale de l’activité consécutive au moratoire sur le photovoltaïque. « Chaque mois, nous perdions de l’argent, témoigne Alain Ricaud, le fondateur de l’entreprise, aujourd’hui à la retraite. Plutôt que de licencier, j’ai envisagé de ramener tout le monde à 32 heures sur quatre jours. Mais la réduction de salaire n’a pas été acceptée. En revanche, la semaine de quatre jours a été applaudie. Nous avons donc décidé de ramener tout le monde à 35 heures sur quatre jours. » Arnaud Rochette, fondateur associé, salarié pendant cette période, salue les effets positifs : « Le temps global de trajet a été réduit. Il y avait donc moins de temps improductif, de CO2, de fatigue, de coûts… La nouvelle organisation demandait aussi davantage de moments d’échange entre salariés, ce qui peut être un moyen de stimuler la productivité. »

En route vers les 32 heures ?

Alors, les 32 heures, prochaine étape ? Chez Cythelia, qui a changé de mains, la semaine de cinq jours a été réinstaurée en septembre 2015, dans l’idée de repasser aux 39 heures. « Mon successeur – avec lequel j’entretiens les meilleurs rapports – est probablement plus enclin à faire davantage travailler les salariés dont il connaît les talents et les capacités plutôt que de prendre le risque d’embaucher des nouveaux, explique Alain Ricaud. Je ne lui jette pas la pierre : l’embauche est l’acte le plus difficile dans la vie de l’entreprise ! »

Chez Yprema, la semaine de quatre jours est devenue un acquis, sur lequel il n’est pas imaginable de revenir. Même si, à cause d’un ralentissement du secteur, tous les salariés travaillent désormais les mêmes jours, afin d’optimiser les coûts d’exploitation et d’éviter le recours à l’intérim.

Pour passer aux 32 heures, il conviendrait donc que l’activité soit au rendez-vous, et que certains verrous idéologiques sautent. Mais Claude Prigent reste optimiste : « Avec l’automatisation et la numérisation, la RTT est inéluctable. En parallèle, les efforts demandés aux salariés sont de plus en plus importants, avec un impact évident sur la santé. À tous les niveaux de l’entreprise, les gens saturent. Aujourd’hui, lorsqu’on a fait ses 32 heures de travail, on a déjà largement gagné son salaire ! » À bon entendeur…

Des salariés libérés ?

Une autre voie est explorée par Arcadie, une entreprise de 70 salariés qui fabrique des épices, tisanes et arômes bio dans le Gard. Son quatuor de jeunes dirigeants est réceptif au concept d’« entreprise libérée » dans laquelle les salariés s’organisent librement et sans chefs. Un forum ouvert s’est tenu, faisant émerger leurs questionnements et besoins. Priorité numéro un : le temps de travail et les congés. Un groupe de travail, ouvert à qui le souhaite, s’est formé pour accoucher de propositions concrètes sur le sujet. « La démarche est enthousiasmante, commente Matthieu Brunet, l’un des dirigeants. Nous avons envie d’aller vite et d’être ambitieux, mais il ne faut pas brusquer les choses. Libérer une entreprise peut prendre plusieurs années. »

Article tiré de Kaizen 25. Dossier « Travailler moins pour vivre mieux » réalisé par Clarisse Briot.


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Le 8 décembre 2016
© Kaizen, explorateur de solutions écologiques et sociales

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