Chronique de Pascal Greboval

Après Notre-Dame-des-Landes : Tendre la main pour aller plus loin.



Bien sûr, nous applaudissons des deux mains la décision du gouvernement de stopper le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. L’écologie a remporté une bataille face à l’économie. Ne boudons pas cette victoire. Mais qui dit victoire dit défaite. Il suffit d’entendre, lire les réactions des pro aéroport pour comprendre que celle-ci est cuisante, difficile à digérer. En toute honnêteté les réactions auraient été, je pense, plus violentes si le choix avait été contraire. Pour autant, face aux défis que nous devons relever, comment tendre la main à ces nouveaux opposants ?

Comment trouver un processus de décision qui tende vers des consensus écologiques rapidement ? Car les dernières études nous rappellent les unes après les autres que nous avons peu de temps pour changer de modèle avant que la détérioration des écosystèmes ne soit irrévocable ! Vingt ans pour les plus optimistes, trois ans pour les plus pessimistes. L’heure n’est plus aux divisions mais aux décisions rapides ! Au hasard :  Comment fermer Fessenheim vite et une partie du parc nucléaire français ? Comment remplacer le modèle agricole français sous perfusion pétrochimique par des fermes collaboratives et biologiques, qui approvisionnent un territoire ? C’est peut-être moins emblématique que Notre-Dame-des-Landes, mais c’est tout aussi crucial.

Est-ce une question de posture ? Crier fort et penser le contraire ? ou inversement ? L’électorat au détriment des valeurs.  Un exemple parmi d’autres : Benoit Retailleau, sénateur Les Républicains, ex-président du conseil régional des Pays de la Loire, a été l’un des plus virulent après l’annonce de l’arrêt de Notre-Dame-des-Landes : « L’État donne raison aux voyous et désavoue les citoyens ». Étonnant, car ce même Benoit Retailleau a déposé et porté au sénat, la loi sur le préjudice écologique, adoptée, en 2016. Elle peut se résumer en quelques mots : « Toute personne qui cause par sa faute un dommage à l’environnement est tenue de le réparer. » (art. 1386-19.) Benoit Retailleau telle une éolienne, adepte d’une écologie à vent tournant ? Et quel raccourci de mettre sous une même étiquette : des propriétaires, des paysans, qui habitent, travaillaient sur ce territoire, des militants écolo-pacifiques, et une minorité un peu plus véhémente…  Comment dans un monde si complexe, qui demande discernement, faire cet amalgame ?

Ces réactions montrent les limites de notre système de gouvernance. Ils sont les deux faces d’une même médaille, appelée démocratie, qui arrive à bout souffle, où lors d’un vote, d’un choix par / à la majorité, la minorité accumule frustration et ressentit. Où intérêts particuliers et biens communs sont à égalités

On peut miser sur le temps. Il efface les cicatrices et les rancunes. Quand le bilan des deux septennats de François Mitterrand est passé au crible, peu lui reproche d’avoir arrêté l’extension du camp militaire du Larzac à son arrivé au pouvoir en 1981. C’était le temps où la conscience, l‘urgence écologique était à ses prémices. Mais comme évoqué plus haut, miser sur le temps c’est prendre un risque pour les générations futures. Sommes-nous, les politiques sont-ils prêts à prendre ce pari ?

Certes décider par consentement pour ce genre de projet est complexe. Mais ne pas réfléchir au processus qui vont guider les choix à venir, c’est prendre le risque de les ralentir ou passer à côté des plus justes pour le bien de l’humanité.

En attendant, et c’est aussi un rappel ; le concept de Gandhi, de « marcher sur deux jambes », repris par Jon Palais et Alternatiba qui conjuguent contestation [cette victoire est surtout le fruit des luttes,  des zadistes] et proposition favorisent des changements de sociétés.

Nous Kaizen sommes dans une dynamique proposition mais nous n’oublions pas de tendre la main, au cas par cas, à ceux qui contestent. Il est temps d’allonger le pas.

Pascal Greboval

Rédacteur en Chef

Le 23 janvier 2018
© Kaizen, explorateur de solutions écologiques et sociales

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Marie l. le 23/01/2018 à 20:02

Tout est dit, aucun aspect oublié, la transition urge, et en l'occurrence elle ne peut, pour le moment qu'être le résultat de choix de vie individuels (nouveaux paysans) et ... de luttes, puisque nous avons élu (pas moi) un gouvernement qui prône la fuite en avant productiviste, avec pour seul horizon : le profit.